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La Palangrotte
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24 août 2013

Fadiouth et ses mille et un secrets

Une île aux mille et un secrets. Voila ce que renferme Fadiouth. Un endroit qui, au fil du temps, a su garder un œil attentif sur son héritage culturel. Au détour d’une virée en gondole, 7 faits ou endroits ont piqué notre curiosité. Fadiouth ne serait certainement pas ce qu’elle est sans ces 7 incontournables.

ILE AU CHARME MYSTIQUE : Fadiouth et ses mille et un secrets
FADIOUTH - C’est bien connu, toutes les îles du monde ont chacune des choses qui les singularisent et font leur charme. L’île de Fadiouth est tout aussi féerique que mystérieuse. Elle cache soigneusement ses mysticismes, mais rayonne de chaleur humaine et de bonne humeur. Fadiouth, ce sont ses coquillages, ses greniers sur pilotis et surtout la bonne cohabitation entre musulmans et chrétiens qui va bien au-delà de la vie sur terre. L’île sérère se découvre et se dévoile. Au «Populaire», elle a bien voulu ouvrir ses 7 incontournables qui font d’elle un endroit unique au monde. En atteste la vague incessante de touristes qui s’y déverse chaque jour.

Les coquillages

Si Venise a ses gondoles, Fadiouth a ses coquillages. C’est la première chose qui saute aux yeux du visiteur qui débarque fraîchement du pont. Et l’on comprend très vite pourquoi Fadiouth porte le surnom de l’île aux coquillages. Sur toute son étendue, le sol est recouvert de coquillages. Les anciens du village disent que leur histoire est confondue avec celle de Fadiouth. En effet, on raconte que les premiers habitants de l’île vivaient d’huîtres qu’ils retiraient de la mer et gardaient les coquilles pour s’en servir notamment dans la construction.

Plus tard, certains ont même fait des extensions de l’île à l’aide de ces coquillages. Aujourd’hui, ces coquillages font le charme de l’île. Ils sont partout et les résidents y marchent souvent pieds nus en toute aisance. De leur blancheur éclatante après la pluie, ils illuminent les visages des habitants qui ne se lassent jamais d’apprécier ce qui constitue à leurs yeux une grande fierté, une chose propre à eux et qu’ils comptent bien conserver.

Le «ngël» ou «Sabar» aux rythmes sérères

En bon terroir sérère, Fadiouth est une île très conservatrice de ses us et coutumes. Parmi eux, le «ngël», un rite savamment entretenu au fil des générations. C’est une danse traditionnelle qui s’organise à la place centrale du village comme au bon vieux temps. Chaque classe d’âge

organise son «ngël» dans le but de se connaître et de raffermir les liens. Le 14 août dernier, c’était les Fadiouthiens de 40 ans qui ont célébré leur «ngël». A l’occasion, ils se sont confectionné des tenues similaires, ont dansé aux rythmes des percussions, et ce malgré les quelques gouttes d’eau qui émanaient du ciel. Entre les battements des tam-tams accompagnés par les mélodies d’un piano et d’une guitare et la voix suave d’un chanteur, l’ambiance était à son paroxysme.

Mais le «ngël» ne s’est pas toujours fait ainsi, se remémore le vieux Dominique Sarr. Selon cet ancien de l’île, à leur jeunesse, seuls les tam-tams assuraient l’ambiance et chaque tranche d’âge avait un rythme de percussions qui lui était propre. Avec la modernité, même le moyen de financer le «ngël» a changé. «Pour organiser le «ngël», nous nous levions de bonne heure pour aller vers les villages riverains, nous y labourions un champ moyennant un porc et quand nous revenions sur l’île c’était la fête autour du tam-tam», évoque le sexagénaire. Mais, explique Badou Geth, un guide touristique, le «ngël» était aussi une occasion pour les jeunes hommes en âge de se marier de repérer les jeunes filles qui venaient danser en même temps qu’eux. Au fil des années, les Fadiouthiens ont su conserver cette culture qu’ils ont transmise aux plus jeunes pour que toute la communauté se connaisse et puisse s’entraider en cas de besoin, lorsqu’ils seront hors de l’île.

LES CIMETIERES MIXTES : Musulmans et chrétiens y gisent

FADIOUTH - Les cimetières de Fadiouth ne sont pas sur l’île habitée. Ils sont sur une autre île qui fait face à la principale. Jadis, il fallait prendre une pirogue pour y aller, mais maintenant il suffit d’emprunter le pont en bois qui y mène, différent de celui qui lie Fadiouth à Joal. Les cimetières sont très propres et un silence de cathédrale y règne. C’est ici où sont inhumés les habitants de l’île qui sont décédés et ce sans distinction de leur appartenance religieuse.

La partie chrétienne est la plus grande. Ce qui peut se comprendre par le fait qu’il y a plus de chrétiens à Fadiouth que de musulmans. Ces derniers occupent la partie Est du cimetière. Rien ne sépare les deux parties, pas même un mur. Ici tout se confond. Et souvent, c’est la croix qui indique qu’il s’agit d’un chrétien.

MYSTIQUE SUR L’ILE AUX COQUILLAGES : Mamandeign ou le baobab protecteur et vengeur de Fadiouth

Fadiouth, un village bien mystique. Surtout un lieu qui recèle des secrets, à l’image du Mamandeign, le baobab protecteur et vengeur de l’île, vieux de 600 ans, selon certains, de 800 ans, d’après d’autres. A l’image aussi de l’île déserte interdite de Moussamolonko, ou encore de Mamagétye où Senghor faisait ses bains mystiques.

FADIOUTH - Il est imposant. Il a la hauteur d’un fromager et gît majestueusement dans l’épicentre de l’île, plus précisément au quartier Ndionguène. Il est vénéré et surtout il est respecté de tous. Lui, c’est Mamandeign, le baobab protecteur de Fadiouth. Sur l’île, chaque lignée maternelle et patriarcale a son génie protecteur, mais Mamandeign est celui qui veille sur tout le monde, même si sa gestion revient exclusivement à l’ethnie des Diakhanora. C’est le vieux Dominique Sarr qui s’occupe de lui et se charge du bon déroulement des offrandes que le baobab doit recevoir. Au début de l’hivernage, les dignitaires du village reçoivent des instructions des esprits et se dépêchent de les mettre à exécution.

Un baobab vieux de 600 ou 800 ans

Personne ne saurait vous dire son âge exact. D’aucuns parlent de 800 ans alors que d’autres parlent de 600 ans. L’arbre est plus que mystique, selon son conservateur. «Même pour couper une branche, il faut avoir l’autorisation des esprits et leur faire des offrandes», explique-t-il.

Cet arbre protège tous les fils de l’île, même s’ils sont ailleurs. Et le vieux conservateur raconte : «Quand quelqu’un vous fait du tort, il faut venir ici, prendre un coquillage et confier sa peine au baobab. Il vient avec moi prendre un bain mystique et c’est toute la famille de l’offenseur qui recevra une correction de la part du baobab».

Le vieux affirme que cela se fait jusqu’à aujourd’hui, mais vu la sévérité de la punition que reçoit la famille de ceux qui ont fait du tort à leur prochain, il refuse souvent que les gens viennent déposer des plaintes auprès de Mamandeign. Au chapitre des sacrifices qu’il a l’habitude de demander, le conservateur souligne que c’est rarement du porc, mais plutôt des poulets ou des chèvres.

Mamandeign déploie ses branches sur ses fils et les couvre de son ombrage signe de sa sécurité infaillible. Il a un jumeau, un autre baobab. Njangol est son nom. Il se trouve de l’autre côté sur une autre île, au cœur des cimetières.

Moussamolonko ou l’île déserte interdite…

FADIOUTH - Il y a une autre île qui jouxte Fadiouth. Il faut moins d’un quart d’heure de gondole pour s’y rendre. Mais cette île est interdite d’accès à certaines heures de la journée, même pour les natifs de Fadiouth. Au-delà de 13 heures, il n’est plus recommandé d’y aller. Cette île s’appelle Moussamolonko ou encore «Tinding».

Devant elle, c’est une forêt noire qui s’offre en spectacle et qui semble être impénétrable. C’est un endroit très mystique et très peu de gens sont enthousiastes à l’idée de l’évoquer ou de nous y mener. Certains Fadiouthiens pensent que Moussamonko serait une déformation du nom du guerrier peulh Moussa Molo Baldé. Car, on pense qu’il y serait enterré, même si aucune thèse scientifique n’a encore étayé cette hypothèse. Ce qui est sûr par contre, c’est que Moussa Molo fut un lieutenant de Meïssa Wally Dione qui a conquis toute la zone.

Mamagétye, là où Senghor venait faire ses bains mystiques

FADIOUTH - Ne le cherchez pas sur l’île aux coquillages, il n’y est pas. Il faut contourner l’île des cimetières pour l’apercevoir. On peut y accéder à pied quand le bras de mer s’assèche. Sinon, il faut y aller par une gondole. L’endroit est calme. Il se nomme Mamagétye.

Mamagétye, c’est un grand buisson ou gît majestueusement au centre un grand baobab. C’est ici que le premier président de la République du Sénégal, Léopold Sédar Senghor venait faire ses bains mystiques pour se prémunir du mauvais sort. On raconte qu’il y venait la nuit à bord d’un véhicule banalisé.

Mamagétye est protégé par un animal sacré qui ne se montre que très rarement. Il s’agit d’un varan aux mensurations énormes, selon les Fadiouthiens. Dans son recueil de poèmes «Nocturnes», le président poète écrivait : «J’ai consulté les initiés de Mamagétye au sanctuaire des serpents, ils m’ont dit leur silence, la stupéfaite obscurité de leurs yeux et de leurs oreilles».

UNE AUTRE PARTICULARITE FADIOUTHIENNE : Les greniers sur pilotis

FADIOUTH - Lorsqu’on quitte les cimetières pour rejoindre Fadiouth, il ne faut pas se précipiter sur le pont. Il faut prendre une gondole pour aller admirer les greniers sur pilotis. L’embarcation glissera tranquillement sur le bolong ou bras de mer pour se retrouver 10 minutes après en face de ses cases qui juchent sur des échasses piqués dans l’eau. Ce sont des greniers qui ne servent plus maintenant, mais qui ont rendu un grand service aux premiers habitants de l’île aux coquillages.

Le guide raconte que les greniers sur pilotis ont été imaginés par les ancêtres en leur temps pour mettre à l’abri les récoltes, car les incendies étaient très fréquents sur l’île. Aussi, le fait d’écarter les greniers et de les mettre sur l’eau faisait que les rongeurs ne pouvaient pas y avoir accès. Aujourd’hui, c’est sur un petit îlot que se dressent ces greniers. A côté d’eux, des artistes ont ouvert leur galerie.
De nos envoyés spéciaux : Mamadou L. CAMARA & Mbaye THIAM
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